Il n’a fallu que 20 minutes aux flammes pour embraser les 24 étages de l’IGH Grenfell Tower à Londres (RU). Depuis, cette catastrophe soulève de nombreuses interrogations sur les normes incendies et la prévention passive au sein de la communauté Européenne. Outre les derniers rapports d’audit demandés par les pouvoirs publics au CSTB (Centre Scientifique et Technique du Bâtiment) sur les failles éventuelles de la réglementation actuelle autour de la sécurité incendie, le GTFI (Groupement Technique Français contre l’Incendie) anticipe et s’implique sur les mesures de protection passive contre les incendies. Ils ont récemment actualisé leur synthèse technique sur le calfeutrement des joints linéaires coupe-feu, en collaboration avec les membres actifs du syndicat dont fait partie Construction Specialties. Faisons-le point sur les joints coupe-feu et sur les bases de la protection passive contre l’incendie.
Qu’est-ce que la protection passive contre l’incendie ?
La protection passive regroupe un ensemble de dispositions qui évitent la propagation rapide de l’incendie dans l’ensemble du bâtiment et dans les structures avoisinantes. L’évacuation des occupants doit être facilitée et sécurisée tout comme l’intervention des pompiers dans le bâtiment. Cette mesure préventive exige lors des phases de conception et des phases de construction d’un ouvrage de considérer la résistance et de la réaction au feu des matériaux et des éléments de construction intégrés du projet.
Quelle est la différence entre réaction au feu et résistance au feu ?
Si on évoque la protection passive et la sécurité incendie, il convient de différencier ces deux termes fréquemment employés :
- LA RÉACTION AU FEU :
La réaction au feu évalue les comportements et l’impact d’un matériau (plastique, textile, bois, béton…) durant les phases d’un incendie. La réaction au feu caractérise la contribution des matériaux à la propagation du feu.
Les normes relatives à la réactivité au feu :
La norme française NF P92-507, plus communément appelée classement M s’applique aux matériaux d’aménagement. Elle les catégorise en 5 niveaux selon leur degré d’inflammabilité (émanations de gaz inflammables) et de combustion (chaleurs émises). M0 définit le statut d’ininflammabilité (laine de roche, ardoise, ciment…) tandis que M4 les matériaux facilement inflammables (papier, polyester…). Depuis l’arrêté du 21 novembre 2002, les matériaux de construction doivent être exclusivement régis par classement Euroclasse : EN 13501-1 et EN 13501-2.
Les matériaux y sont distingués selon leur type de la façon suivante : matériaux de sols (fl), de type longiligne (l) et les autres produits de construction. Cette nomenclature est plus précise que le classement M. Elle détermine la réaction au feu selon deux critères : la teneur des fumées avec l’indicateur « s pour smoke » et les débris et gouttelettes produites sous l’effet de la chaleur avec l’indicateur « d pour drops ».
Les matériaux sont analysés sur la base de ces deux critères, eux-mêmes hiérarchisés selon leur niveau de performance face au feu.
Correspondances entres les classes Européennes et le classement Français :
Classes selon NF EN 13501-1 | Correspondance NF P92-507 : classement M | ||
---|---|---|---|
Comportement au feu | Fumées dégagées | Gouttelettes | Exigence |
A1 | - | - | Incombustible |
A2 | s1 s1 | d0 d1 | M0 M1 |
A2 | s2 s3 | d0 d1 | M1 |
B | s1 s2 s3 | d0 d1 | M1 |
C | s1 s2 s3 | d0 d1 | M2 |
D | s1 s2 s3 | d0 d1 | M3 M4 (sans gouttelettes) |
E | Non applicable | d1 d2 | M4 Pas de classement |
F | Non applicable | Non applicable | Pas de classement |
NB : la correspondance se lit uniquement dans le sens Euroclasse vers le classement M.
- LA RÉSISTANCE AU FEU :
La résistance au feu est un indicateur qui exprime la durée pendant laquelle des corps complets composant la construction (plancher, mur, fenêtres, porte…) conservent leurs propriétés originelles face au feu. Les propriétés d’origine sont évaluées selon le degré de résistance mécanique (R), d’étanchéité (PF/ RE) et d’isolation thermique (CF/ REI).
Les différents attributs d’un classement de résistance au feu :
Critères | Résistance mécanique (RM) | Étanchéité face aux flammes, fumées et gaz chauds (EF) | Isolation thermique (IT) | Classement Français | Classement Européen |
---|---|---|---|---|---|
Stable au feu | X | SF | R | ||
Pare-flamme | X | X | PF | RE | |
Coupe-feu | X | X | X | CF | REI |
Étanchéité | X | E | |||
Isolation thermique | X | I |
Ces critères définissent une des deux variables de la résistance au feu. Ils sont toujours complétés par une durée de performance. Elle est exprimée en minutes pour le classement Européen et en fractions d’heures pour le classement français.
NB : la norme européenne remplace progressivement la classification française en matière de coupe-feu. Par exemple, une porte coupe-feu 2 heures s’identifiait avec le classement français par CF 2h, est désormais identifié par un classement Européen comme de résistance REI120.
La protection passive commence par spécifier des matériaux selon leurs réactions au feu
Les matériaux spécifiés lors de la phase de conception ont un impact et un comportement différent lorsqu’ils sont confrontés au feu. Choisir des matériaux qui retardent la progression du feu au lieu de l’alimenter contribue à maitriser le niveau de dommages corporels et matériels tout en facilitant les opérations d’évacuation en cas d’incendie. La règlementation en vigueur impose déjà selon l’usage du bâtiment d’utiliser des solutions spécifiques et un calfeutrement adéquat afin de compartimenter les espaces et de les rendre indépendants en cas d’incendie.
Quels sont les rôles des joints coupe-feu dans la protection incendie ?
Les joint de dilatation ou de construction sont des espaces fractionnés essentiels à la vie d’un bâtiment. Ils autorisent et anticipent les variations de températures et les mouvements des sols pour éviter les tassements et les fissures dans la structure. On distingue les joints de dilatation des joints de construction lorsqu’une élasticité plus importante est attendue de la structure. Les profilés coupe-feu doivent être spécifiés en fonction du type de joint qu’ils calfeutrent.
Les accessoires coupe-feu sont des profilés d’obturation intumescents destinés à traiter les joints horizontaux ou verticaux, de dilatation ou de construction. Ils contribuent aux performances thermiques et acoustiques d’un ouvrage mais leur vocation principale est de ralentir la propagation du feu, de retarder l’élévation de la chaleur et d’isoler les fumées toxiques.
Cloisonner les espaces d’isolant ignifuges et réfractaires lors de la construction cantonne les dangers occasionnés par l’incendie en plus une zone durant un temps limité. La propagation du feu et des fumées toxiques est ralentie et plus facilement maîtrisée par les pompiers lors de leur intervention.
Les fumées toxiques sont responsables de 80% des décès lors d’incendies. Ce chiffre annoncé par le Ministère de la Transition écologique et solidaire, nous amène à considérer la dépendance entre la sécurité incendie et les joints coupe-feu.
Type de joints coupe-feu
Il existe différents types d’accessoires coupe-feu qui calfeutrent les joints. Fabriqués dans des matières intumescentes d’origine minérale (nappe, panneaux ou cordons) ou synthétique (mousses, silicones, bandes élastomère…) les accessoires doivent être spécifiés selon la dimension du joint à calfeutrer et selon l’amplitude attendue par la structure (joints statiques ou dynamiques).
Proposés en différents diamètres et adaptés aux joints de petite et moyenne ouverture, les cordons sont des accessoires coupe-feu performants très présents dans les structures. Ils sont tressés en matière minérale (fibres bio-solubles, silice, laine de roche…) et gainés dans un maillage de verre. Selon leur processus de fabrication et leur composition, les accessoires coupe-feu répondent aux critères CP (coupe-feu) ou PF (pare-flame). Au regard de la norme en vigueur, les procès-verbaux de classement au feu des solutions de calfeutrement doivent faire référence à l’arrêté du 22 mars 2004 et la norme EN 13501-2.
Dans la majorité des constructions, une résistance de 1 à 2 heures à la propagation du feu est requise pour la structure et les planchers. Il convient cependant de vérifier l’exigence réglementaire selon la fonction du bâtiment construit ou réhabilité.
Il est essentiel de vérifier pour le produit spécifié sa durée en fonction de son diamètre. Beaucoup de fabricants précisent une durée moyenne et omettent de mentionner pour quel diamètre la durée indiquée s’applique. La sécurité passive du projet est intimement liée à la performance du joint linéaire coupe-feu. Il est préférable de vérifier si le produit envisagé correspond aux besoins et aux contraintes de la structure auprès d’un spécialiste.
Adaptés aux ouvertures entre 20 et 120 mm, les cordons coupe-feu de la gamme Jointofeu® assurent jusqu’à 4 heures d’isolation thermique et d’étanchéité de l’espace face aux flammes, gaz et fumées. La durée d’isolation croît avec le diamètre du cordon. Un profilé de 90 mm de diamètre Jointofeu® assure à minima 240 minutes de protection tandis qu’un cordon de 30 mm adapté aux joints de 20 mm va assurer une protection de 180 minutes (3 heures)
Comment s’installent les joints coupe-feu ?
La mise en œuvre des profilés coupe-feu de type cordons coupe-feu s’effectue à l’aide de colles réfractaires ou de clips. Elle nécessite à l’instar des mastics ou mousses intumescentes un nettoyage profond et un dépoussiérage de la zone à calfeutrer avant la pose. Les nappes ou assemblages en fibre naturelle aluminisée nécessitent d’être maintenus de part et d’autre avec des cornières clouées ou visées au substrat. Les panneaux en laine de roche haute densité destinés à créer un coffrage, traitent les joints de dilatation en phase de bétonnage et sont préalablement fixés à l’aide de ressorts en acier galvanisé.
Ou installer un joint coupe-feu ?
Appliqués principalement dans la construction et la réhabilitation des bâtiments les accessoires coupe-feu comblent les joints de dilatation et de construction en respectant les contraintes de mouvement attendues. Ils s’adaptent aussi au calfeutrement de mur-rideau, les portes, ou poteaux et colmatent des systèmes industriels tels que les clapets, les gaines, conduits, calorifugeage des tuyaux ou les bardages.
Évolution de la réglementation ?
La sécurité passive est une mesure préventive obligatoire dans les ERP ainsi que des immeubles de grande hauteur (IGH), les bâtiments industriels et les lieux de travail, conformément au code de la construction et de l’habitation. On peut s’attendre, selon les préconisations du CSTB émises lors de leur audit sur la sécurité incendie en France, à voir prochainement les normes renforcées en matière d’isolation en façade pour les futurs programmes de constructions et de réhabilitations des bâtiments de 3ème et de 4ème famille. Une uniformisation des normes entre les immeubles de 4ème famille et les normes de construction relatives aux IGH est également préconisée. En effet, la hauteur des structures peut être similaire (entre 49 et 51 mètres) mais les exigences applicables sont très différentes.
Depuis plus de 60 ans Construction Specialties développe et poursuit ses innovations au service de vos bâtiments et pour vos projets. Si vous souhaitez en savoir un peu plus sur les solutions destinées au traitement des mouvements du bâtiment, contactez notre équipe de techniciens Couvraneuf®